Rencontres
Alain Parodi,
Chef Français du restaurant VERi TABLE
Alain Parodi a ouvert son restaurant à Neo Psychiko en 2019. De rencontres en opportunités, il quitte le sud de la France pour le nord-est d’Athènes. Rencontre avec ce chef, ancien étoilé qui, comme le nom de son restaurant le laisse supposer, est une personnalité vraie, franche, généreuse et sincère.
Écrit par Julie-Anne Amiard
28 février 2023
Français, d’origine italienne, pourquoi la Grèce, pourquoi Athènes ?
A.P. Quand j’étais étoilé dans le sud de la France, le groupe Apostolos Trastelis, qui ont plusieurs restaurants à Athènes, notamment le Spondi, deux étoiles Michelin, sont venus faire un petit périple gastronomique sur la Côte d’Azur. Ils ont visité huit restaurants dont le mien. A ce moment-là, j’avais le poulpe, le calamar, toutes ces belles choses que l’on trouve également en Grèce. Ils ont commencé à me draguer, à me demander de venir en Grèce bla bla bla et au bout d’un certain temps, j’ai accepté. Voilà comment j’ai atterri ici ! J’ai commencé par faire du consulting dans tous les restaurants de Monsieur Trastelis et rapidement nous avons fait le choix de nous installer définitivement en Grèce.
Quelles ont été vos premières impressions quand vous êtes arrivé à Athènes ? Quelles émotions la capitale suscite-t-elle encore en vous ?
Pour moi, Athènes et la Grèce suscitent toutes les émotions du sud de la France, quarante ans en arrière. C’est un pays encore sauvage malgré tout, plein de découvertes, il y a tant de choses à explorer. Je pense également qu’ils sont juste au début de la gastronomie ici et qu’il y a encore plein de possibilités mais là, on parle business. Émotionnellement, ça me rappelle le Sud parce que je continue d’aller à la pêche, à la mer, je vais aussi en montagne chercher des champignons, tout cela me renvoie à ce que j’ai vécu en France donc je ne suis pas très dépaysé. Ça me rappelle ma grand-mère quand, petit, je l’accompagnais chercher les herbes dans la forêt. Aujourd’hui, quand je vois les mamies sur le bord de la route ramasser les herbes sauvages, ça me fait penser à ces moments.
Votre restaurant VERi TABLE, quand, comment, pourquoi l’avez-vous créé ?
Après plusieurs années de conseils dans divers restaurants, on a décidé de monter un petit bistrot, ma femme et moi. C’était six mois avant le Covid, en avril 2019. On voulait un petit truc qui nous correspondait, à taille humaine et garder ce côté artisanal qui a tendance à disparaitre de plus en plus. On a donc créé ce restaurant, très axé sur les fromages, la charcuterie française mais aussi espagnole, italienne et beaucoup de vins également. On a une super cave. Je ne voulais pas faire quelque chose de commun. Ici, vous pouvez venir uniquement pour boire un verre de vin, manger un peu de charcuterie ou commander des plats gastros, des plats bistrots. Je voulais satisfaire une clientèle large car on a quand même beaucoup de grecs, environ 80 %, une clientèle qui voyage beaucoup à l’étranger, beaucoup à Paris, et qui souhaite manger des plats qui leur rappellent la France. On me demande de faire des quenelles, le pot au feu… On est loin du Fine Dining, on est sur des plats très traditionnels et cela, je ne veux pas le perdre.
Donc 80% de votre clientèle est grecque ?
Oui, nous avons beaucoup de notables, d’avocats, de chirurgiens, de politiciens, de ministres aussi…
Pourquoi avoir choisi Neo Psychiko pour ouvrir votre premier restaurant ?
C’était une opportunité. On a trouvé un petit restaurant qui nous convenait.
“Je joue à fond la carte française“
C’est aussi une clientèle différente, moins cosmopolite moins internationale qu’à Athènes ? Vous avez donc des rapports plus proches avec une clientèle plus fidèle, plus intime ?
Exactement. On reste un petit peu privé, un peu caché. Beaucoup d’expats viennent également chez nous. On a toutes les entreprises, les directeurs, ils viennent tous ici. On a une super clientèle. On est gâté.
Et les 20% restants de votre clientèle ?
On a des Français qui nous trouvent grâce à des médias comme le vôtre, au bout de quatre, cinq jours de nourriture grecque, certains ont envie de retrouver un peu la cuisine française ! On mange quand même beaucoup de souvlaki ici, parfois il est sympa de retrouver un bon rognon de veau à la française ! Ma plus grosse vente ici, c’est le pigeonneau.
Quels autres plats français sont particulièrement prisés par vos clients locaux ?
Le pigeon donc car personne n’en fait à Athènes mais aussi beaucoup de pâtés de campagne, les tripes aussi !
Vous vous fournissez au grand marché d’Athènes ?
Oui, pour les produits de saison mais nous avons surtout nos propres fournisseurs. Tout ce qui est méditerranéen, je me sers ici, en revanche, de France, je fais venir tous mes fromages, mes pigeons, toutes les volailles de Brest, les chapons, le foie gras. Le foie gras fait partie de nos premières ventes. On est presque à 300 kilos par an ! On travaille la saison, la fraîcheur, on essaie d’avoir quelques plats un peu tendances parce qu’il faut toujours un petit peu suivre la gastronomie malgré tout mais la majorité de nos plats sont bistrots avec beaucoup de terroir. Je joue à fond la carte française.
“Il se dégage quelque chose d’incroyable à Plaka”
Quelles sont vos meilleures adresses à Athènes ?
Je sors très rarement parce que je travaille comme un forcené mais j’adore ça, c’est ma thérapie. Sinon, je vais au Spondi, chez Hervé Pronzato, après il y a de très belles tavernes de poissons dont je ne me souviens pas du nom, chez Krystallis à Pendeli.
Et vos quartiers de prédilection ?
Plaka, sans aucun doute. J’aime cette atmosphère que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Ce phénomène de l’Acropole au-dessus de vous. Toutes ces petites rues marchandes. Cette sérénité. On peut s’y balader pendant des heures, s’arrêter boire un café n’importe où. Il se dégage quelque chose d’incroyable à Plaka. Je suis amoureux de Plaka.
VERi TABLE Bistrot et Bar à vins Aggelou Sikelianou, Neo Psychiko – http://veritable.gr
(c) Veri Table