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Il y a de plus en plus de Français à Athènes, de parisiens. Mélanie Nydegger, la créatrice d’Eikosi Dyo, marque de joaillerie, fait partie de ceux qui rapidement ont su que la Grèce deviendrait leur pays d’adoption.
Pourquoi la Grèce, pourquoi Athènes ?
M.N. J’étais vraiment toute petite quand je suis venue la première fois en Grèce, je devais avoir cinq, six ans. Ça a d’abord été un amour des îles, je partais en vacances avec ma famille tous les étés, à Mykonos ou en Crète. J’en garde des souvenirs incroyables. A l’époque, Mykonos était beaucoup plus sauvage même si elle ramenait déjà un peu de touristes fortunés, son aéroport la rendait plus facile d’accès. C’était une époque magique, d’ailleurs, dans mon enfance, quand on me demandait d’où je venais, je disais que j’étais grecque. Ma sœur me disait « mais arrête, les gens vont se rendre compte que tu n’es pas grecque ! », mais j’insistais, je disais « si si, je suis grecque, je le sais, je le sens ». C’est drôle quand des années plus tard on repense à ce genre de détails, je ne pensais pas que la Grèce allait prendre une place si importante dans ma vie, d’autant que j’ai passé des années par la suite sans y retourner. Et puis, en 2009, je suis retournée à Mykonos, ça a été un peu un choc. 2009 par rapport aux années 1980, c’était plus la même mais j’ai quand même retrouvé l’ambiance grecque, quelque chose de mon enfance et c’est à partir de là que les choses ont commencé. En rentrant à Paris, j’ai réalisé que je n’avais plus du tout envie de rester là. C’était bien évidemment pas possible d’envisager vivre sur une île, d’autant plus que c’était le début de la crise en Grèce, j’ai rangé ce projet dans un coin de ma tête et deux ans après, quand j’ai revisité Athènes, j’ai eu un gros coup de cœur pour cette ville, un coup de foudre immédiat.
Vous n’aviez pas encore créé votre marque à ce moment-là ?
J’étais rédactrice de mode à Paris et j’étais vraiment au bout, je crois, de ce que j’avais à proposer. J’étais en freelance, les magazines commençaient à tomber les uns après les autres. J’étais à un carrefour de ma vie et j’ai senti une main se tendre ailleurs et ça a été la Grèce. J’avais cette passion pour les bijoux et il est vrai qu’en Grèce, le bijou est présent depuis l’Antiquité. Il y a des ateliers à Athènes à n’en plus finir. Il y a un nombre de créateurs grecs exponentiel, les petits bijoux en or font vraiment partie de la culture. J’ai décidé de travailler les belles matières, nobles, comme l’or, les pierres précieuses et semi-précieuses. Je voulais les faire fabriquer à Athènes parce qu’ils ont un savoir-faire qui est plus traditionnel, plus artisanal. Ça donne une poésie et quelque chose d’unique à chaque bijou. Une authenticité que j’adore. Je ne fais pas dans la demi-formule, je ne partage pas la production avec l’Inde, la Thaïlande, je voulais que tous mes bijoux sortent de mon atelier.
On ne s’improvise pas créatrice de bijoux, comment vous êtes-vous reconvertie ?
J’ai, pendant pas mal d’années, fait des allers-retours entre Athènes et Paris. Je suis restée neuf mois dans un atelier avec un bijoutier, un artiste qui m’a appris à travailler, à faire mes propres prototypes, il m’a prise sous son aile et m’a montré les rouages du métier.
Qu’est-ce qui vous a séduit immédiatement à Athènes et qui vous a donné envie de ne plus en partir ? Un quartier, une odeur, une terrasse ?
Un peu tout ça à la fois. Le premier quartier qui m’a séduit ça a été Exarchia, où j’ai vécu d’ailleurs. Cette ville est surprenante, on dirait des scènes de film, les toits, les rues, les orangers dans la rue, l’odeur de néroli quand ils fleurissent. Tout ça m’est extrêmement familier aujourd’hui mais je me souviens de cet émerveillement quand je voyais ces orangers. On a l’impression que le temps est un peu ralenti ici, il y a quelque chose de plus simple. Les gens prennent le plaisir et le temps de vivre. Ça fait partie de leur culture. Mettre le temps sur pause sans culpabilité. Et puis ici, il existe ici une proximité avec la nature que l’on n’a pas à Paris, la montagne, la mer, tout est proche. L’amour de la terre … les Grecs sont beaucoup plus connectés à la nature. Ici, j’ai l’impression de retrouver un rythme qui correspond plus à ce que je suis. Paris m’entrainait dans une course : qui tu es, où tu vis, qu’est-ce que tu portes, est-ce-que tu as le dernier sac de chez machin, tu portes encore le modèle de la saison dernière ? Cette surenchère incessante, à un moment donné, j’ai voulu lâcher prise et retourner à plus de simplicité. J’ai enfin été séduite par la culture méditerranéenne, orientale, l’influence des Balkans. Athènes est très imprégnée de ces trois cultures. Je trouve ça magique.
Vous êtes toujours à Exarchia ?
Je suis à Kypseli désormais mais Exarchia restera mon quartier préféré et c’est un peu là où j’ai grandi finalement, professionnellement parlant. Là où j’ai fait mes premiers pas. Les gens, le voisinage, leur gentillesse, mon quartier était une vraie famille. Les gens m’ont accueilli de manière si inattendue comme si je faisais partie des leurs. Kypseli est un quartier agréable aussi mais plus résidentiel et puis j’ai un chien et rares sont les journées que je commence sans traverser le parc Pedion Areos.
Quelles sont vos adresses ?
Je vais surtout dans les boutiques vintages pour les fringues mais Athènes est surtout idéale pour son artisanat, son local, sa céramique, pour chiner des meubles comme au marché aux puces de Monastiraki. Pour un café, je vais chez Soussourada, rue Mavromichali à Exarchia, au Bateau ivre, rue Agias Zonis à Kypseli, à Apoteka, rue Derigni, à côté du square Victoria et surtout à Dexameni, en bas de l’hôtel Saint-George, à côté du cinéma en plein air éponyme, dans une petite rue piétonne. Sinon, pour dîner, je vais à Ama Lachei, une super taverne rue Kallidromiou à Exarchia, un incontournable ou Isandsia, rue Melanthiou à Psyri.
Et les week-ends ?
Si le week-end est long, je pars à Sifnos. C’est certainement mon île préférée des Cyclades. On y mange extrêmement bien, l’île est petite et relativement proche d’Athènes, on peut y être en deux heures environ. Sinon, je vais à Hydra. Je suis fan. C’est ultra touristique mais j’aime le fait qu’il n’y ait pas de voitures, tout est accessible à pied, j’aime sa petitesse. J’aime énormément Aegina, très proche d’Athènes, avec des bateaux toutes les heures.
Vous vous êtes intégrée à la communauté française d’Athènes ?
Oui, il y a beaucoup de Français mais aussi beaucoup de Belges, d’artistes, de peintres, de sculpteurs qui viennent s’installer à Athènes pour une qualité de vie différente. Il y a une émergence au niveau de l’art ici qui est particulière, il y a beaucoup de petites galeries, de petites expositions qui font la promotion de jeunes artistes.
Quel objet avez-vous acheté ici et dont vous ne vous séparerez jamais ?
Un tableau qui représente une scène de mariage, avec des grenades, avec des coqs, tous les porte-bonheurs du mariage, un couple très folklorique, traditionnel. Un tableau peint sur du tissu. Je l’ai depuis le début, il n’a pas de grande valeur mais j’y tiens particulièrement.
Finissons sur vos créations, quel mot pour les décrire ?
Minimalistes. Je veux qu’on oublie qu’on les porte. J’essaie de mettre de la magie dans mes créations surtout. Je crois en beaucoup de choses, la nature, la propriété des pierres, de l’or… J’essaie d’insuffler de l’énergie pour que le bijou devienne un talisman, chargé d’une bienveillance.
Eikosi Dyo, chez I-D Concept, rue Kanari Athènes et chez Merci, Paris XIe + eshop
(c) Eikosi Dyo
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